• Une écolière, en hiver, dans les années 50 (1950-1960)

    Une écolière, en hiver, dans les années 50 (1950-1960)

    Il est 8 heure, l’heure de partir pour l’école.

    Ce matin de décembre, il fait froid et le temps est humide. Il faut mettre les galoches. Une semelle de bois, d’une épaisseur d’environ 2 centimètres, est la base de ces chaussures. L’empeigne et la tige, qui remontent plus haut que la cheville pour protéger de la pluie et du froid, sont en cuir, un peu raide, percé d’œillets où passent les lacets. Ces derniers sont taillés dans des chutes de cuir. Ces galoches alourdissent la marche tout au long du trajet. Il y a un bon kilomètre entre la maison et l’école, mais elles permettent d’avoir les pieds au sec toute la journée.
    Pour se protéger du froid, un pull en laine tricoté à la main sous la blouse de l’école et un gilet, en laine lui aussi, par-dessus. Le tout recouvert d’un manteau, qui a servi seulement le dimanche les deux premières années, et qui servira encore deux ans pour aller à l’école. Pour lui donner un peu d’ampleur, on a déplacé les boutons et ainsi gagné deux à trois centimètres en largeur. Pour la longueur, seules les manches seront allongées avec une bande de velours noir, pour mieux recouvrir les poignets et rejoindre les gants, eux aussi tricotés à la main tout comme les chaussettes qui montent jusqu’aux genoux, au niveau du bas de la jupe, car à cette époque, les filles ne portaient pas de pantalon.

    Dans les années 50, l’école était obligatoire jusqu’à 14 ans. Seulement un petit pourcentage d’élèves partait au collège vers l’âge de 12 ans pour poursuivre de plus longues études. La plupart des enfants faisaient la totalité de leur scolarité à l’école du village, clôturée par un examen appelé « certificat d’études »qui réunissait tous les élèves âgés de 14 ans du canton.
    A l’école, il était de coutume que les élèves, dès l’âge de 11 ans, effectuent, tour à tour et deux par deux, « une semaine de service » qui se renouvelait deux à trois fois dans l’année. Ces jours-là, on partait plus tôt, à 7 h 45, afin d’être à l’école à 8 h. Cette « semaine de service » consistait à nettoyer le tableau noir et balayer la classe le matin avant l’heure d’ouverture de l’école. Ce n’était pas une corvée, mais une fierté.
    D’octobre à avril, la mission comportait également l’allumage du poêle. Pour commencer, il fallait enlever les cendres refroidies de la veille. Ensuite, c’était toujours un périple d’aller remplir le seau à charbon dans la cave faiblement éclairée par une petite ampoule électrique. L’endroit idéal pour jouer à se faire peur. Mais pas le temps de s’attarder, il fallait allumer le poêle pour chauffer la classe avant l’arrivée des élèves, ne pas oublier de mettre du charbon pour maintenir le feu tout au long de la journée et balayer le sol quelque peu sali par la préparation du poêle. Garnir le foyer avec un peu de papier journal et des buchettes de bois, braquer l’allumette et voir la flamme s’élancer et pétiller, c’était une belle satisfaction ! Ensuite arrivée l’heure pour les élèves de rentrer dans la classe qui peu à peu se réchauffait. En silence, les enfants regagnaient leur place, le cours pouvait commencer.
    L’hiver, la neige était très attendue par les enfants. Sur le chemin de l’école ou dans la cour de récréation, c’était de belles batailles de boules de neige en perspective. Un autre divertissement consistait à faire une « glissade » sur la neige gelée. A Cessieu, la cour de l’école de filles était un peu en pente ce qui permettait d’avoir plus d’élan. Très vite « la glissade », d’un mètre de large, pouvait atteindre 8 à 10 mètres en longueur. C’était la patinoire de l’époque !

    Les élèves glissaient avec leurs galoches. Sur la semelle, ils avaient rajouté quelques clous plats à quatre pointes, dont le rôle initial était de protéger de l’usure le bois des galoches, mais qui permettait également de glisser mieux et plus vite.

    Au plus froid de l’hiver, la température extérieure pouvait rester en négatif, c'est-à-dire en dessous de zéro degré, de jour comme de nuit, pendant deux ou trois semaines. Ce qui conservait bien « la glissade ». Les élèves l’entretenaient en versant dessus, le soir à 16 h 30 à la sortie de l’école, un ou deux seaux d’eau qui gelait rapidement. Cela augmentait l’épaisseur de la glace que le passage répété des enfants avait quelque peu abimée.
    Un autre plaisir de la période hivernale c’était « mardi gras ». L’occasion bien sûr de préparer des « bugnes » une spécialité Lyonnaise très appréciée dans notre région. La pâte, faite de farine, de sucre, d’œufs, de lait et de beure, était malaxée, puis étendue au rouleau à pâtisserie. Quel plaisir ensuite de la découper en portion avec un petit outil en bois, appelé « roulette », qui faisait des bords dentelés et enfin la plonger dans l’huile bien chaude en faisant très attention de ne pas se brûler. Une tâche qui occupait bien tout un après midi d’hiver, récompensée par la dégustation de cette délicieuse pâtisserie !
    L’autre animation du « mardi gras » c’était de faire « les mascarades ». Il fallait se déguiser. Dans les années 50, les déguisements n’étaient pas en vente dans les magasins et personne à la campagne n’aurait eu les moyens financiers pour en acheter. Les plus habiles pouvaient les confectionner. Mais la plupart du temps, les enfants dénichaient leurs trésors dans la garde-robe des parents.
    Une robe ou bien une blouse par ci, un chapeau garni de fleurs et de rubans ou un renard en fourrure par là, c’était parfois le déguisement des garçons, pour de ne pas être reconnus en se grimant en fille, mais aussi celui des filles très fières de pouvoir « jouer à la dame ». Chez les messieurs, on pouvait emprunter une veste, un pantalon, un chapeau ou un béret mais aussi une grande chemise de nuit blanche qui faisait ressembler à un fantôme. Sans oublier la pipe pour compléter l’accoutrement. Un petit masque en forme de huit, percé de deux trous pour les yeux, garantissait l’anonymat.
    Ce mardi-là, à la sortie de l’école, à 16 h 30, il fallait faire vite pour rentrer à la maison. Le déguisement avait été préparé la veille et très rapidement endossé pour ne pas perdre de temps. Ainsi affublés de leurs trouvailles vestimentaires, les enfants allaient se montrer de maison en maison. L’accueil était en général chaleureux, le jeu consistait à deviner qui se cachait sous le déguisement, car dans le village, la plupart des gens se connaissaient. Les enfants dévoilaient alors leur frimousse et agitaient de petites boites en fer qu’ils avaient percées d’une fente pour recueillir les quelques piécettes généreusement offertes. C’était la tradition, dans chaque maison, quelques petites pièces de monnaie avaient été mises de côté et destinées « aux mascarades ».

    Mardi gras c’est fin février ou début mars, et le soleil se couche vers 18 h 30. L’arrivée de la nuit annonçait la fin de la fête. Vite, il était temps de rentrer à la maison où attendaient les devoirs ! Mais tout d’abord, après s’être réchauffé auprès du feu, quel plaisir de compter le contenu de la boite. Ce modeste pécule sera rapidement converti en bonbons et chewing-gum, ou peut être servira-t-il à acheter la belle gomme rose et bleue aperçue dans la vitrine du magasin, afin de remplacer le lambeau de gomme blanche bien rangé dans le plumier, à côté du crayon à papier et du porte-plume « sergent major » ?

    En ce temps-là, la télévision n’existait pas. Les soirs d’hiver, une fois les devoirs terminés, on trainait un peu devant la soupe, très occupé à raconter aux parents les péripéties de la journée.
    En hiver, les nuits sont froides et il n’y avait pas de chauffage dans les chambres. A l’heure du coucher, il fallait réchauffer le lit. Des briques, ou plus souvent de grosses pierres, étaient mises dans le four du poêle depuis l’après midi. Bien chaudes, roulées dans une bande de tissu pour éviter les brûlures, elles étaient déposées dans le lit un quart d’heure avant le coucher et répandaient ainsi une douce chaleur pour s’endormir douillettement sous les couvertures de laine et l’édredon de plumes qui permettaient de garder la chaleur au creux du lit jusqu’au bout de la nuit glaciale. Ce matin-là, aux premières lueurs du jour, les carreaux de la fenêtre étaient totalement recouverts de givre qui formait de magnifiques dessins.

    Quelques instants encore pour les contempler et il sera l’heure de se lever si on ne veut pas être en retard à l’école ! 

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    1er rang assises, de gauche à droite : Evelyne GUYOT, Marie Thérèse QUERENET, Mauricette BONVALET, Geneviève VOISIN, Bernadette ERBS, Evelyne MIEGE, Françoise GIRERD.

    2ème rang : Nicole VERNAY, Jeanine CORONT DUCLUZEAU, Maryse PERENET, Sylvie BIESSY, Chantal GIRERD, Josette GUILLOT.

    3ème rang : Andrée GAGET, Michèle QUERENET, Annick PERRIN, Mauricette MIEGE, Viviane LUINO, Anne Marie VEIGNER, Nadia PUPATO.

    4ème rang : Suzanne LAUBIN, Jeanine MIEGE, Emma DURAND, Lucienne PERENET, Jacqueline SEYSSEL, Marie Joseph BRUNIER, Jeanine GRUFFAZ. 

     

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    1er rang, assises de gauche à droite : Sylvie BIESSY, Nicole VERNAY, Jeannette DEPLANCHE, Michèle CATAFORT, Jeanine MIEGE, Françoise POMMIER.

    2ème rang : Andrée GABIER, Mauricette VEILLEUX, Jeanine GRUFFAZ, Jacqueline SEYSSEL, Renée BOUROT, Danièle MONTIGNON, Maryse PERENET .

    3ème rang : Emma DURAND, Michèle RABATEL, Andrée GAGET, Michèle QUERENET, Mauricette MIEGE, Françoise VOISIN.

    4ème rang : Michèle BOROT, Suzanne LAUBIN, Denise LEOTHAUD, Marie Josèphe RABILLOUD, Christiane GARNIER, Mara SCANAVINO, Lucienne PERENET.

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